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A la recherche d'un autre modèle (1)

C'est GuillaumeD qui en parle : Apparu rencontre des jeunes de gauche un peu utopiques lors d'un débat radiophonique, puis la conversation se poursuit en off.  Et quand on discute avec un gars de droite d'une alternative au modèle néolibéral capitalistico-financier, il répond goguenard et dubitatif : "Vas-y, propose autre chose!"

Alors spontanément, comme la question m'interpelle, je me tourne vers l'alternative la plus forte sur l'échiquier politique (parce que la décroissance, c'est déjà exclu) pour voir à quoi elle ressemble au fond et si elle manque tant que ça de crédibilité.

Le vote Montebourg aux Primaires m'a beaucoup intriguée, je l'avoue, parce que je me sens assez attirée par la radicalité de ses propositions. C'est lui, vraiment qui porte le discours du changement à gauche et réactualise le vieux clivage. Il me semble d'ailleurs qu'il pourrait opportunément prendre toute sa place aux côtés de Mélenchon qui l'y invite ce soir...

Mais je voulais mieux comprendre ce que c'est que la démondialisation (qui est reconnue comme LE positionnement  vigoureux de gauche, propre à faire renaître le socialisme contre les affreux socio-démocrates libéraux) alors j'ai cherché. Et ça tombe bien ! J'ai trouvé un texte collectif rédigé par d'autres porteurs de changement (pas nécessairement ancrés à gauche : et non, enfin, je pense que le clivage ne marche plus là non plus... mais pas de droite non plus) que sont les altermondialistes d'Attac. Vous me direz pourquoi s'intéresser  à un débat entre Attac et Lordon et pas entre Madelin et Montebourg ?

Parce que je ne crois pas être libérale économiquement, et que justement, il m'importe de réflechir à autre chose que ce que nous pratiquons déjà. Par conséquent la vieille dichotomie droite-gauche, libre-échange versus réglementation ou protectionnisme, me semble obsolète en ce qui concerne l'invention d'une autre formule.

Mais il y a une autre cause: GuillaumeD a dit cela ailleurs sur son blog et je crois qu'il a profondément raison : un certain nombre de mes amis ont quitté le MoDem parce qu'ils ont été déçus de ne pas retrouver clairement énoncée la volonté de changer de modèle qui nous avait séduits dans le discours de Bayrou en 2007. Rappelons qu'il a milité jeune chez Lanza del Vasto et qu'il lui reste sans doute quelque chose de cete utopique posture...

Par conséquent, j'imagine (mais je lis déjà sur certaines lèvres le sourire ironique qui est la sanction de ma naïveté !) que si on arrive à composer au MoDem quelquechose qui serait un mixte de réformisme et d'altermondialisme, (que j'entends bien comme la recherche d'un autre modèle social, d'un autre progrès social que celui du pouvoir d'achat ou de la protection des droits sociaux... ) alors, nous tracerions enfin la troisième voix que nous portons depuis 2007 et que JFK ne place pas au milieu mais en avant. Y en a qui disent qu'on le fait déjà ? Ben oui, mais ça ne s'entend pas. J'ai même lu récemment que Bayrou était le plus archaïque des hommes politiques économiquement parlant... Et on laisse EELV seul sur le créneau, sans dire assez fort qu'ils ont déjà fait le choix du ralliement, et qu'il ont donc perdu une part de leur liberté de création...

Mais laissons s'installer le débat :

1er acte : Attac publie une tribune dans Médiapart pour critiquer la démondialisation, concept hyper tendance FN et inadapté à la possibilité de proposer un modèle alternatif où parfois il faut plus de mondialisation et parfois moins... Ils sont européanistes et attachés à l'universalisme, donc peu enclins à la fermeture. Assez surprenante tribune car d'aspect consensuel et peu virulent. Lordon les accuse d'ailleurs de relayer les arguments des éditorialistes libéraux.

http://blogs.mediapart.fr/edition/les-invites-de-mediapart/article/060611/la-demondialisation-un-concept-superficiel-et-s

 

2ème acte : Lordon répond longuement en accusant les altermondialistes de prôner au fond la démondialisation tout en refusant de le dire pour ne pas être assimilés FN. Il replace de très intéressantes définitions de concepts (notamment en éclairant la distinction d'une mondialisation des externalités qui suppose une réflexion mondiale sur les conséquences telles que le réchauffement climatique ou la souveraineté alimentaire... qu'il oppose à une mondialisation de la libéralisation financière et capitaliste ; l'une étant selon lui opératoire et constructive, l'autre négative à abolir : il accuse de façon sous-sous-jacente Attac de mal faire le distinguo).

J'apprécie aussi l'idée pas neuve mais importante que dénoncer la mondialisation, c'est incriminer des structures et non des hommes (travailleur chinois), qu'on ne peut pas reprocher aux pays émergents leur stade de développement mais qu'on doit s'attaquer aux mécanismes portés par l'UE et l'OMC qui permettent la libre-concurrence avec eux ; évidemment sur l'oligarchie économico-financière, qu'il attaque dans un deuxième temps, il perd un peu son objectivité...

Son idée fondamentale, c'est que la notion de souveraineté est moderne, non pas celle de souveraineté du peuple, mais celle d'un peuple (notion plastique et non figée) qui se choisit comme souverain en fonction de communs possibles, ce qui peut l'élargir à la dimension européenne ou régionaliste dit-il (donc pas FN ni Dupont-Aignan). J'aime assez ce concept qui rejoint l'idée de Benassayag de reterritorialisation (comme palliatif à la mondialisation qui individualise et uniformise ; Lordon dit qu'elle globalise et détruit le politique)

Par contre, il vire à la caricature sur la fin en opposant le modèle allemand comme incompatible avec le modèle méditerranéen: ce n'est pas la Grèce qui doit sortir de l'euro pour lui mais l'Allemagne qui impose son modèle de compétitivité et le diktat de l'euro comme sa monnaie propre, à toute l'Europe.

Mais surtout, ce qui m'intéresse particulièrement, c'est qu'il accuse les altermondialistes d'être des "idiots utiles" à la Jacques Attali, des faiseurs de y a qu'à, faut qu'on... C'est la même critique que celle d'Apparu, à peu de choses près !

http://blog.mondediplo.net/2011-06-13-Qui-a-peur-de-la-demondialisation

 

3ème acte : Donc j'ai été particulièrement attentive à la nouvelle réponse de Pierre Khafa d'Attac dans cette optique. Il explique les limites du rétablissement des barrières douanières vu les modes de productions actuels qui pareront forcément et vu les distorsions du coût du travail qui rendraient nécessaires dans la logique, un protectionnisme national plus qu'européen qui conduirait à une intensification de la guerre commerciale (Merde, il est de droite le mec d'Attac!).

Il reproche à Lordon de ne pas faire le lien entre contrainte actionnariale du capitalisme et concurrence, et critique la vision trop économique (et peu stratégique) de la sortie de crise qui consiste à attendre qu'elle fasse son oeuvre, balaye le vieux système et en fasse advenir un plus sain.

Il dénonce aussi le présupposé peu fondé qui consiste à promouvoir la souveraineté comme panacée sans s'interroger sur la mise en place des conditions politiques d'un retour à la souveraineté d'un peuple qui est loin d'être réalisable aujourd'hui et pour la construction de laquelle il faudra travailler bien au-delà de l'éclatement projeté par Lordon de la zone euro.


http://blogs.mediapart.fr/blog/pierre-khalfa/200611/les-impasses-de-la-demondialisation

 

Conclusion 1 : En fait, pour trancher au terme de cette première étape : ce que je trouve vraiment intéressant dans l'altermondialisme, c'est son insistance (qui manque fort dans la démondialisation qui au final, quoi qu'on en dise, n'est qu'économique) sur la nécessité d'une prise en compte internationale de l'unité de l'humanité à l'aune de la mondialisation des droits. Il y a de la lutte et du militantisme citoyen là-dedans puisqu'il s'agit de libérer l'être humain (au cas par cas, pas dans le global!) des soumissions économiques et politiques.


Par contre, rétablir des barrières douanières n'est encore qu'une solution de gauche qui limite le champ d'action des citoyens, et laisse aux acteurs économiques et politiques traditionnels le soin de se mettre d'accord ou de se contraindre mutuellement, sans qu'aucun compte ni aucun changement profond ne soit demandé à celui qui consomme et qui cautionne, et qui baigne dans le néolibéralisme en le critiquant sans s'en sentir lui-même acteur fondamental... La démondialisation remplace des structures par d'autres structures. Or, pour moi la solution est en dehors des systèmes qui aliènent toujours, dans l'engagement propre de chacun.

 

Conclusion 2 : J'ai trouvé passionnant ce débat entre Lordon et Attac. pour deux raisons : d'abord parce qu'il m'a confortée dans l'idée que l'alternative n'est pas l'idéologie de gauche. Etant donné l'horreur sarkozyste,  je suis tentée parfois en effet de choisir l'option de l'opposition officielle... C'est triste aussi de voir des amis, anciens centristes se rabattre sur la gauche, juste pour virer Sarko !

Mais, et c'est le second enseignement de ce débat, nous ne nous en sortirons pas en conservant les clivages traditionnels : la solution est ailleurs. Les démondialistes ne sont pas archaïques parce qu'ils sont de gauche, mais parce qu'ils préconisent des solutions qui semblent tenir compte des aspirations du peuple contre l'oligarchie, mais en réalité, accusent des entités abstraites et lointaines, et ne prévoient pas de donner des responsabilités économiques aux citoyens-consommateurs. Il faudrait effectivement tomber d'accord sur ce constat : les problème ne viennent pas seulement d'ailleurs, nous les portons tous collectivement et individuellement parce que nous en sommes à la fois la cause et le remède !

La modernité passe par de la régulation d'accord (lutte contre la spéculation et les paradis fiscaux) , de la reterritorialisation certes (relocalisation de la production et valorisation des entreprises de taille humaine), mais surtout de la responsabilité ! Par exemple, pour ce qui est des banques, la solution, ce n'est selon moi ni la recapitalisation qui laisse perdurer le mal sans le traiter, ni la nationalisation qui transfère le pouvoir de contrôle à l'Etat. Les banques, ce n'est pas l'Etat, c'est nous, c'est notre argent ! Alors outre l'exigence saine de remettre en oeuvre la séparation des banques de dépôts et des banques d'investissement, il est peut-être temps de nous rendre tous conscients de ce que produit notre argent quand on croit qu'il fructifie sur nos comptes d'épargne... Nous sommes d'ailleurs dans la semaine de l'ISR (investissement socialement responsable), c'est le moment d'en comprendre les enjeux si on n'a pas vu : Moi, la finance et le Développement durable ! Vous me direz Montebourg préconise la VIème République comme complément de la démondialisation ! Mais c'est encore juxtaposer le politique et l'économique, alors qu'il faudrait une fois pour toutes les relier et les allier.

 

Conclusion 3 : Il faudra donc encore creuser la question pour parvenir à tracer les contours plus clairement de ce modèle nouveau de société dont on peut dire déjà qu'il se passera des systèmes (et sera donc peut-être en cela plus libéral que le libéralisme tel qu'on le vit aujourd'hui ! C'est ça Florent, dis ?;-))

Commentaires

  • interessanr marie pierre cette analyse qui remet a nouveau au centre de tout projet l individu et non pas la structure étatique ou privée .La responsabilisation de tous via l education , la culture , l economie est bien au centre du modèle que nous aimerions voir arriver : prendre le pouvoir non pour le garder mais pour le rendre aux citoyens via des structures lègères ou les egos n auront plus leur place .L ideologie du grand soir n est pas notre tasse de thé mais nous croyons a l intelligence collective d ou notre optimiste raisonné

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