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J-18 L'Europe et la taxe Tobin

"Encore un coup de l'Europe !"

 

Ma première réaction à l'annonce des décisions du conseil des ministres des finances européen qui s'est tenu hier a été la déception : en effet, la taxe sur les transactions financières (aussi nommée Taxe Tobin) sera appliquée à partir de 2016 dans les 11 pays de l'UE qui l'ont acceptée mais elle a été négociée  a minima et ne rapportera que 3 milliards au lieu des 30 escomptés parce qu'elle n'inclut pas tous les produits dérivés de la finance.

James Tobin dans les années 70 voulait en l'appliquant limiter la volatilité des capitaux. De nombreuses ONG dont Attac et le CCFD réalisent des plaidoyers intenses pour aboutir à "taxer la finance" ou créer la taxe "Robin des bois". Philippe Douste-Blazy milite depuis longtemps et très ardemment comme président d'Unitaid, fonds multinational abondé par une taxe sur les billets d'avion et destiné à lutter contre la pauvreté et les pandémies dans le monde, pour que, sur le même mode, le principe de la Taxe Tobin avant tout solidaire des pays les plus pauvres soit adopté. Invitant à retrouver l'esprit du capitalisme familial, il rappelle que les capitaines d'industrie faisaient vivre des familles tout en contribuant au bien commun (écoles, hôpitaux) par la fiscalité. La taxe Tobin est pour lui une compensation logique des dérives du capitalisme financier, mais aussi une réponse cohérente à la mondialisation des échanges, l'impôt local, géré par les élus locaux n'étant destiné qu'à un usage local. L'impôt international qu'elle constitue répond à la mondialisation des flux. "A côté de la mondialisation de l'économie ou de la communication, nous devons édifier une nouvelle architecture de l'aide au développement, plus stable, plus durable, nous devons faire naître une véritable mondialisation de la solidarité." afin d'atteindre les objectifs du Millénaire fixés par l'ONU.

Aussi, lorsque j'apprends que l'UE se fait finalement le chantre d'une TFF floue dans ses modalités d'application, réduite à la taxation des actions et à celle de certains produits dérivés, et qu'on ignore finalement quelle sera l'affectation du produit de la taxe qui pourrait être utilisé autant à la régulation financière qu'à la solidarité internationale, je suis déçue...

 

Et puis, j'ai réfléchi :

- D'abord, cette taxe est finalement moins ambitieuse que prévue parce qu'elle risque de déséquilibrer l'économie des pays qui choisiraient de l'appliquer appliquée à l'ensemble des actions, obligations et produits financiers. Taxer l'épargne et les fonds de pension liées aux retraites par ex, fragilise l'édifice et entraîne des tentations de délocalisation. Combattre les abus ne signifie pas obérer les capacités de financement des entreprises, des ménages ou des assurances... Ce faisant, je relativise ma prévention spontanée contre la finance... Elle n'est pas le Diable (ni même l'ennemi) ! Elle est même indispensable pour faire fonctionner l'économie et créer des emplois.

- Ensuite, je m'en remets à l'esprit de la fondation et donc à "la politique des petits pas" vantée par Monnet. Effectivement, on pouvait espérer mieux, mais il y a dix ans, seuls les altermondialistes en parlaient, l'idée de la taxe, d'abord jugée utopique par les gouvernements, s'est imposée concrètement en 2011 et il faut se réjouir qu'en l'espace de 3 ans, elle ait fait un tel chemin grâce à la pression des ONG mais aussi à la volonté de certains acteurs politiques : une fois n'est pas coutume, la prise de position forte de Nicolas Sarkozy en faveur de la taxe et de ses effets d'entraînement, l'application de la directive européenne en France pour donner l'exemple, sont à saluer. Michel Sapin affirme que cette première étape sera suivie d'autres avancées...

 

Deux points d'objectif que rappelle le programme des Européens pour ces élections :

- Il faut viser la gouvernance mondiale pour gérer cette taxe à l'échelle de la planète entière. Une taxe financière ne peut se concevoir qu'à ce niveau car les capitaux n'ont pas de frontières. En montrant l'exemple, l'Europe s'honore et incarne le modèle social qu'elle promeut à l'échelle mondiale tout en étant en capacité de s'assurer des ressources propres. Charge aux ONG et aux électeurs de continuer à peser sur les gouvernements pour que d'autres suivent.

- Il faut viser la création d'un budget propre pour l'Union Européenne. Pour l'instant les gouvernements le refusent contre l'avis de la commission et du Parlement Européen, le budget est alimenté par des contributions nationales et soumis aux pressions du "retour sur investissement". Cette bataille, comme l'affirme Sylvie Goulard, "Pour le groupe ALDE auquel j’appartiens, mais aussi pour bien des collègues, c’est la mère des batailles. Tout le reste est littérature et mauvaise littérature : on n’aura jamais une UE crédible si elle reçoit de « l’argent de poche » de 27 parents radins qui se chamaillent" Pour ce faire, la preuve de la capacité de l'UE à lever des ressources propres telle que le produit de cette taxe est une avancée.

 

En conclusion

Pour finir, c'est comme souvent avec l'Europe : le premier mouvement n'est pas de tendresse, car les décisions prises sont souvent en-deçà des attentes. Et puis, passée la première réaction de colère, on prend un peu de recul et on finit par comprendre que le mieux est l'ennemi du bien, surtout en matière de construction européenne. Pour citer René Char : "Il n'y a que deux conduites avec la vie : ou on la rêve ou on l'accomplit". Peut-être l'opposition est elle encore ici un peu binaire ; on peut envisager que le rêve nourrisse l’accomplissement : à l'origine de la taxe Tobin comme de l'Europe, il y a le rêve d'un monde plus solidaire... Mais entre les embourbements oiseux et égoïstes des discussions infinies des 28 et le concret d'une avancée, il faut choisir l'avancée ! Le binaire ici est plus facile à trancher.

Plutôt que d'accuser l'Europe et de vouloir la détruire parce qu'elle ne fonctionne pas, comme citoyens européens, accomplissons : continuons à faire pression en participant aux plaidoyers et en nous engageant aux côtés es acteurs de la société civile pour que cette taxe notamment, progresse en profondeur et en étendue.

Et choisissons le programme qui impose la création d'un budget propre de l'UE et l'impulsion d'une fiscalité nationale permettant de dégager des marges de manœuvres : élisons des parlementaires européens convaincus de cette nécessité, ne craignons pas d'élargir l'ambition : "En donnant aux peuples européens le contrôle direct du budget européen par leurs députés européens élus depuis juin 1979 au suffrage universel direct, on simplifierait la chaîne institutionnelle, et démocratiserait les procédures budgétaires." (Sylvain Rokotoarison excellent sur le fonctionnement du budget de l'UE : ici et )

 Votons pour Les Européens !

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LE PROJET COMPLET DES EUROPEENS POUR LES ELECTIONS DU 25/05

 

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